Les murs ont des oreilles : les histoires des espaces LGBTQ2S+ de Montréal
Exposition présentée par V. Samoylenko
(automne 2021)
Mise à jour par M. Daigle (été 2021)
Mise à jour par V. Samoylenko (hiver 2022)
Introduction
Prenant inspiration de projets de géographie humaine comme Queering the Map et Mapping Montreal's Queer Spaces , le projet Les murs ont des oreilles cherche à non seulement placer les diverses expériences de personnes LGBTQ2S+ sur une carte, mais à les rendre audibles et à combiner plusieurs types de médias. Le projet prend la forme de survol d’importants quartiers, endroits et évènements pour les communautés LGBTQ2S+ de Montréal, sans non plus négliger des espaces qui sont simplement chers pour les participant.e.s qui ont partagé leurs histoires dans le cadre de cette exposition.
La présente exposition est un projet pilote. Cependant, à cause de contraintes de temps, ainsi que le contexte de pandémie, il ne fut possible de solliciter qu’un nombre limité de participant.e.s et d’explorer seulement un petit nombre d’endroits. Tout de même, les récits des participant.e.s, juxtaposés ci-dessous, permettent de faire ressortir des réalités parfois contradictoires qui ont existé ou qui existent en même temps. Comme pour notre propre mémoire, le projet combine plusieurs espaces-temps de façon simultanée. Nous espérons que Les murs ont des oreilles sera un projet inspirant pour la création de projets plus élaborés incluant la géographie humaine, l’histoire orale dans les communautés LGBTQ2S+, et d’autres médias. Également, pour la création de futurs projets, nous espérons voir une collaboration plus étroite avec les Archives gaies du Québec et d’autres centres d’archives LGBTQ2S+ au Canada, et même internationalement. Finalement, ce projet représente les possibilités de recherche et de création de projet dans des conditions difficiles de confinement et de distanciation sociale.
Nous avons eu la chance de présenter notre exposition sur la portion piétonne de la rue Sainte-Catherine à l’été 2021. Dans le but d’en faciliter l’accessibilité, l’exposition Les murs ont des oreilles restera toujours disponible en ligne.
Montréal : ville gaie
Les histoires présentées dans cette exposition sont celles de sept narrateur.rice.s : Armando Perla (A.P.), Derek Vincent (D.V.), Pierre M. W. (P.M.W.), Ménélik Blackburn-Philip (M.B.P.), Mathilde Geromin (M.G.), Kimura Byol-Nathalie Lemoine (k-l) et Michelle Wouters (M.W.). Ces personnes m’ont raconté leurs expériences et m’ont parlé des lieux qui leur importaient. Certain.e.s parmi les participant.e.s sont né.e.s ici; d’autres ont immigré à Montréal, souvent parce que la ville leur paraissait plus ouverte aux personnes LGBTQ2S+.
L’exposition est divisée par quartiers : même si certains lieux se trouvent en dehors des quartiers mentionnés, ils sont regroupés en fonction de leur proximité pour en faciliter la localisation, et aussi pour en permettre la mise en contexte historique de certains.
Il est à noter que les lieux présentés dans cette enquête sont ceux dont les personnes interviewées ont parlé lors de leurs entrevues. En réalité, il y en avait beaucoup d'autres. De plus, les extraits d’entrevues sont présentés dans leur langue d'origine. Leur contenu est donc rapporté tel qu'il a été dit.
Pour écouter les témoignages, cliquez sur les points dans les cartes des différents quartiers. Vous pouvez aussi consulter les photos en entier ainsi que leur source en cliquant dessus.
A.P.: My cousin, who had, you know, the one who had told me initially in El Salvador that I would be able to come here if anything ever happens, she was living in Ottawa, and she would always say to me – she would always talk to me about Montreal. And she would say “oh, you need to go to Montreal” you know, “it’s so gay,” she’s like “you know I have friends, I have Salvadoran gay friends there.”
M.G. : Donc je suis arrivée, donc c’était en ’95 la première fois, tout le monde habitait sur le Plateau, dans des colocations évidemment. Et il y avait tellement, tellement d’homosexuel.le.s c’était génial [rire]. Et, en fait ce que j’aimais beaucoup, c’est qu’il y avait beaucoup d’homosexuel.le.s, beaucoup d’hétéros, et tout le monde se mélangeait, c’était pas un problème en fait. Voilà, c’était plus un problème pour personne. […] Dans ma tête, l’effet d’arriver à Montréal et de pouvoir vivre ça, sans que ce soit un problème, pas un problème pour personne … C’était – J’étais arrivée à la maison en fait.
k-l. : Ce que je me suis dit c’est de m’informer d’abord sur la situation ici à Montréal, par rapport aux homosexuel.le.s. C’est une des raisons pour laquelle je suis venu.e, parce que j’avais vécu beaucoup de discrimination en Corée.
Le Village de l’Ouest
Bien avant que le Village gai de Montréal que l’on connaît aujourd’hui ne se développe, le quartier gai se situait au centre-ville, jusqu’à son déclin au début des années 1980. Centré sur les rues Peel et Stanley, et offrant à l’époque des logements abordables à proximité, il était facile d’accès pour la clientèle gaie. Le centre-ville de Montréal, par contre, était aussi un emplacement prisé par les développeurs immobiliers et les milieux financiers. L’administration du maire Jean Drapeau (1954 à 1957 et de 1960 à 1986) voulait, d’une part, faire de Montréal une ville internationale moderne, et d’autre part, défendre une moralité traditionnelle. Or, la présence d’une enclave gaie au centre-ville posait un problème au maire Drapeau, à la fois pour le développement foncier et pour la moralité.
L’adoption du Bill Omnibus en 1969, décriminalisant l’homosexualité entre adultes consentants dans un espace privé n’a pas empêché les descentes policières sous l’administration Drapeau. En guise de justification légale pour l’arrestation de gais dans les bars, on désignait ces lieux comme « maison de débauche ». D’autant plus que la législation fédérale ne décriminalisait les relations sexuelles entre adultes consentants que dans les lieux privés. Ainsi, la police justifiait son harcèlement à l’égard des gais dans des lieux publics.
Avec les Jeux olympiques de 1976, le nettoyage notoire entrepris par le maire Drapeau entraîne une intensification de la répression policière, non seulement contre les gais et les lesbiennes, mais aussi envers les travailleur.se.s du sexe. Les descentes policières continuèrent après les Jeux. Notamment, celles du Truxx et du Mystique, le 21 octobre 1977, qui ont suscité une réponse instantanée de la part de la communauté gaie. Suite à cette descente, l’Association pour les droits des gai(e)s du Québec (ADGQ), jeune organisme de défense des droits des gais, s’organisa et le lendemain, près de 2 000 personnes manifestèrent pour dénoncer les abus policiers.
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Truxx
Adresse : 1428, rue Stanley
(Descente policière en 1977)
P.M.W. : Le Truxx, j’y allais mais moins, c’était – le Truxx c’était un petit peu plus disco, c’était les p’tits gars un peu plus preppy, un peu plus mode. Mais, pour danser, ça avait un charme […] la descente, j’étais pas là, c’est-à-dire j’allais au bar – quand je suis arrivé la descente avait lieu. J’ai vu effectivement des types, des flics monter comme des parachutistes […] ça faisait penser justement à des interventions policières de dictature. C’était vraiment exemplaire, on était absolument ahuris là, par le style de la descente, d’une, comment dire, une dramatisation, bah, à peu près comme les types que Trump envoie. On pouvait pas croire qu’à Montréal, une descente dans un bar gai, donne lieu à une telle mascarade, une telle farce. Ah non c’était inouï! [rire] Euh, j’sais pas costume de parachutiste, mitraillettes ou enfin fortement armés, les bottes de militaire et tout le truc – invraisemblable! Et effectivement le lendemain, c’était la première – c’était notre petit Stonewall.
Extrait de Sortir de l’ombre :
« Le lendemain de l’intervention policière […], l’ADGQ décide d’organiser une riposte. Ce sont des moments fébriles. Nous sommes samedi. […] Une chaîne téléphonique est organisée dans la hâte; sept heures plus tard, la rue est à nous. Des tracts ont été imprimés et nous les distribuons dans les tavernes en début de soirée. Plusieurs bars refusent la distribution de nos feuillets à l’intérieur des établissements, mais nous sommes devant les portes pour prévenir ceux qui entrent. Vers 22h00, tout semble calme. […] Et très vite un miracle se produit : on est 20, on est 100. D’où viennent-ils ? Qui les pousse ? Quelle force vide les bars ? C’est une marée de chaleur, une vague à la fois en colère et joyeuse. On est 500, 1 000, peut-être plus. La rue Sainte-Catherine est bloquée, les policiers veulent dégager. On les conspue, on court, on crie; ils s’attaquent à ceux qui pendant quelques instants sont isolés. La rue est occupée, c’est l’émeute. Les télévisions sont là. On est 2 000. On a gagné. » -- Jean-Michel Sivry, dans Sortir de l’ombre, pages 244-245
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Au Taureau d'or
Adresse : 1417, rue Drummond
(1967-1974)
Le Taureau d’or est un des nombreux bars où a travaillé John Banks, organisateur du premier défilé gai de Montréal. Pour plus d’informations sur John Banks, les AGQ ont publié un documentaire sur lui en 2018.
P.M.W. : J’avais 22 ans, quand j’ai [rire], quand j’ai passé à l’acte d’aller dans un bar, en me disant que j’allais rencontrer. Et c’était justement Le Taureau d’or. Le Taureau d’or, où le barman était John Banks. […] Finalement c’était un bar étudiant. Les vieux étaient ailleurs, sur Stanley pis les vieux bars comme le 4 coins du monde, et quoi, le Hawaiian Lounge. D’autres noms me reviendront – et le Tropical ! Oui je pense le Tropical sur – où travaillait Armand Monroe. […] Le Taureau d’or n’était pas le genre d’endroit qui attirait les descentes. C’était l’endroit le plus nouveau, donc le plus nouvelle-vague, le plus contemporain et qui ne ressemblait pas à ce qu’on appelait les vieux bars de tapettes à l’époque.
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Peel Pub
Adresse : 1107, rue Sainte-Catherine Ouest
(1958- maintenant au 1196 rue Peel)
Fondée en 1958, la taverne Peel Pub est l’un des nombreux établissements du Village de l’Ouest. À cause du climat de répression policière, le règlement concernant la proximité entre les hommes était strict.
P.M.W. : Les règlements étaient assez durs, et la taverne encore plus parce que c’était une taverne, là c’était carrément les waiters qui venaient nous engueuler ou nous foutaient à la porte. Je me rappelle d’ailleurs une fois à la blague de m’être assis sur les genoux de John Banks [rire] à la taverne au Peel Pub. Et, bah, pour rire là c’était pas du tout, c’était ni sexuel ni – c’était juste à la blague, et aussi un peu pour provoquer les waiters, les garçons. Et on m’avait mis à la porte, mais pas en me refusant de revenir là mais tsé l’avertissement était très sérieux. […]: Début 70, enfin toute la décennie, le Peel Pub était le lieu où on rencontrait tout le monde, et où on trouvait toujours un copain.
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Bud's
Adresse : 1252, rue Stanley
(19??-1984)
La fermeture du Bud’s, pas longtemps après une descente policière le 2 juin 1984, alors que le nouveau Village prenait son essor, démarque souvent la fin du village de l’ouest.
P.M.W. : La nuit effectivement on sortait du Bud’s, qui était aussi un endroit que je fréquentais beaucoup, j’étais très versatile, et le Bud’s la nuit à une heure du matin, il y avait au moins une centaine de clients qui étaient dehors. On sortait même avec nos verres et on buvait sur la rue, en s’assoyant sur les autos, et c’était très le fun, ça faisait très new yorkais justement.
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P.J.'s
Adresse : 1422, rue Peel
(1965-début des années 1980)
Le 1422 de la rue Peel était auparavant occupé par le Tropical Room et le Downbeat Club en 1952. Le Tropical refusait les clients visiblement hétérosexuels. Armand Monroe, qui était l’animateur et un personnificateur féminin au Tropical Room, s’est battu pour que les homosexuels aient le droit de danser ensemble au Tropical, chose qui fut possible pour la première fois à Montréal en 1957. En 1965, un incendie criminel ravage l’établissement, mais le Cabaret PJ’s a pris le relais, et Armand Monroe en était l’animateur. Jusqu’au début des années 80, Le PJ’s est resté un lieu très populaire dans la communauté homosexuelle. Le Cabaret offrait de nombreux spectacles d’artistes travestis.
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Librairie L'Androgyne
Adresse : 1217, rue Crescent
(1973- 2002) 1217, rue Crescent (1975-1982) 3636, boulevard Saint-Laurent (1982-2001) 1436, rue Atateken (2001-2002)
L'Androgyne a été la première librairie gaie et lesbienne à Montréal. Elle avait également une sélection de publications féministes et de livres non genrés pour enfants. Fondée en octobre 1973 et d'abord située sur la rue Crescent, elle est dirigée par une petite équipe à laquelle se joignent à l'automne 1975 un groupe de bénévoles. Ces derniers forment un collectif composé de lesbiennes, d’hétérosexuelles et de gais, de janvier 1976 jusqu'en 1982, date à laquelle la librairie devient une entreprise privée. De 1974 à 1977, L'Androgyne partage son local avec la librairie politique Alternatives, liée à la maison d'édition Black Rose Books. L'Androgyne occupera un autre local plus spacieux sur la rue Crescent à compter de juin 1975, pour ensuite déménager en 1982 sur le boulevard Saint-Laurent, puis sur la rue Amherst (maintenant renommée Atateken) en 2001, jusqu'à sa fermeture en 2002. Initialement dédiée à la vente de publications en anglais, le collectif de la librairie recrute des membres francophones à partir de 1976 et adopte le nom L’Androgyne en 1978.
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Le Village de l’Est
Le Village de l’Est, contrairement au mythe, ne s’est pas déplacé à l’est directement à cause de la violence policière ni du « nettoyage olympique ». Le Village prit son élan vers 1983, soit plusieurs années après ces descentes. Entre autres, le facteur économique, comme la hausse des loyers au centre-ville et les bas coûts des locaux à l’est, encouragea plusieurs entrepreneurs à ouvrir de nouveaux établissements dans le Village. De plus, l’architecture des bâtiments, qui avaient été utilisés comme théâtres, cabarets ou cinémas plus tôt durant le XXe siècle, permettait un aménagement favorable pour ceux qui voulaient ouvrir des bars. Au début des années 1980, plusieurs bars et commerces gais existaient toujours au centre-ville et au Red Light, alors que les bars du Nouveau Village se multipliaient; durant les années 1990, la plupart des commerces gais de Montréal étaient installés au Village. Autrefois parsemé de grands complexes multifonctionnels, tels le Complexe Bourbon, de nos jours, la tendance à l’embourgeoisement met en danger le caractère unique du Village en remplaçant peu à peu les grands complexes multifonctionnels par des immeubles résidentiels en hauteur.
D.V.: I think, the Village back then, even in a period where we were getting more and more accepted, it was still like an oasis, where we felt safer as a part of the city. The Village was a place where you could like, hang out with your friends, and only really gay people would hang out there, so, if you were in the closet you weren’t too worried about that if you hadn’t told your family yet, like – ugh, the struggles! We felt that that was a pretty safe space.
M.B.P. : Même si je suis proche du village en plus … je me sens quand même comme un objet sexuel, plutôt qu’un humain, donc ça l’influence beaucoup mes craintes – ou pas mes craintes mais ça va beaucoup influencer ma perception de la réalité ou des réalités.
J’étais dans le village quand je pouvais sortir dans les bars. Je suis jamais allé.e quand j’étais mineur.e, mais j’ai jamais aimé mes expériences là-bas. C’était plein de blancs, soûls … qui vont me traiter de sexy boy ou de genre beau sauvage ou j’sais pas quoi pis j’suis juste comme … non. Ou me faire pogner les fesses, sans mon consentement… en tout cas – Exclure aussi mon amie fille parce que c’est une fille dans un bar gai. Voilà, fait que j’y allais pis j’suis pas allé.e longtemps.
A.P.: And I remember leaving all my suitcases and everything there, and then coming out, and going on the street, and then going on Sainte-Catherine, and walking, just walking, like it just felt like, the most amazing feeling in the world, it just felt like … [inhale] something I had never felt. […] And I remember, just walking and saying like, “One day I’m going to live here” like, “This is the place where I belong”
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Au Deux R
Adresse : 1556, rue Sainte-Catherine Est
(1982-19??)
Un bar de danseurs nus ayant ouvert ses portes en février 1982, Au deux R est l’un des premiers, sinon le premier bar gai du Village>
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K.O.X.
Adresse : 1182, rue Montcalm
(1984-1996) 1182, rue Montcalm (1984-1991) Station C, 1450-1456, rue Sainte-Catherine Est (1992-1996)
Officiellement ouvert en février 1984, le K.O.X. figure aussi parmi les premiers bars du Village de l’Est.
M.W.: So one night I’m at K.O.X. […] And I went pretty nuts one night and I started making out with a guy. And I guess we were getting a little bit too heavy. Maybe clothes were starting to come off but, I got tapped on the shoulder and I got asked to leave, and I’m like, “I wasn’t doing anything that outrageous!” and they were like, “this is a gay bar ma’am.” I’m like, “but I’m bisexual and so is he!” And we got kicked out because we looked like a straight couple, making out too much in a gay bar when we were both bisexual. Yeah, in 1992. Can you believe that? I got kicked out. I’m kind of proud of it now, like “I got kicked out of K.O.X.!” people are like “What?! I’ve been fisted in K.O.X. and I didn’t get kicked out.” [laugh] Anyway, yes I got kicked out – and the guy was a member, he had a membership.
Extrait de Flâneries et souvenances, Bernard Mulaire
« Une nuit, au sortir du bar bien nommé K.O.X. […] je me suis retrouvé dans le terrain vague qui l’entourait. Précisons que le bar attirait autant des professeurs d’université, des gérants de banque et des hommes d’affaires que des pères de famille, des étudiants, et des voyous de toute sorte. Était-il quatre ou cinq heures du matin? et voilà qu’une voiture de police arrive et braque ses feux sur nous. Aucun cafard n’a aussi vite quitté les lieux. J’ai trébuché, me suis blessé au genou, me suis sans doute réfugié dans un sauna, que j’ai sans doute quitté au matin, en prenant le bus pour chez moi, tout écorché, parmi les travailleurs qui, tout frais douchés et peignés, se rendaient à leur boulot. » -- Bernard Mulaire dans Flâneries et souvenances, p. 271
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Le Drugstore
Adresse : 1366, rue Sainte-Catherine Est
(1998-2013)
Un grand complexe populaire auprès de la communauté lesbienne, le Drugstore servait aussi de lieu de rencontres pour des groupes LGBT. Les permis d’alcool du Drugstore dataient de 1908 et portaient toujours le nom original de l’établissement qu’il avait remplacé, soit La Taverne du Village de l’Est rachetée par Normand Chamberland dans les années 1980.
M.G. : Le vendredi soir aussi, le grand truc c’était d’aller au Drugstore. Le gros bar, sur quatre étages, avec plein de lesbiennes. Et en fait ce que j’aimais bien aussi c’est qu’il y avait une diversité de classes sociales que tu retrouves – que j’ai jamais jamais j’ai retrouvé nulle part ailleurs […] C’était agréable de rencontrer aussi des – pour moi en tout cas de savoir qu’il y avait des lesbiennes plus âgées, et qu’elles avaient encore le droit de sortir, qui sont pas du même milieu que moi et… c’est les seules fois où j’ai rencontré des gens qui sont pas dans le même milieu, qui pensent pas comme moi, qui n’écoutent pas les mêmes choses, qui lisent pas les mêmes choses, et pis que, quand on se rencontrait, on partageait nos histoires de lesbiennes pis ça allait pas trop – plus loin que ça parce que on avait ça en commun mais pas tant d’autres choses mais déjà ça je trouvais ça super en fait. Moi ça me rassurait beaucoup en fait, de pouvoir avoir cet échange-là. Et ça n’existe plus ça, ça n’existe plus. […] Je trouve ça dommage qu’il n’y ait plus cette mixité d’âges, c’est ce qui me manque, moi. C’est d’avoir l’impression que … quand t’es vieux t’es mort quoi, si t’es un vieux queer t’es mort, t’existes plus.
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Parking
Adresse : 1296, rue Atateken (auparavant Amherst)
(2000-2011)
k-l. : Il y avait le Parking, le jeudi avec DJ Mini, qui pour moi était très important parce que le jeudi on savait qu’on allait rencontrer plus de lesbiennes, d’avoir des DJettes lesbiennes, ouvertement lesbiennes, c’était cool moi je trouvais. Parce que quand même, je pense que la communauté lesbienne est plus à risque. Quand même, avec … patriarcat, même avec les féministes parfois, d’être lesbienne c’est pas – même si on dit que oui on accepte, on est féministes, on aime toutes les femmes, moi je vois pas ça tellement encore. Il y a tellement de choses à travailler sur nos propres … notre éducation colonisée, tout est colonisé, tout ce qu’on lit, c’est toujours des références de femmes blanches, féministes blanches, c’est ça qui est prôné.
M.W.: So Parking had a second iteration – it wasn’t as good okay – they had moved location and then finally they got shut down for fucking condos. And ruined that spot. It was the best club. It had all those different spaces, nooks and crannies, clean bathrooms, and a giant terrace, like Sky. So even in the winter – they didn’t allow to smoke inside anymore – you would go up the stairs, and you would have like, little blankets on hooks. So even if you were wearing your skimpy disco outfit, you can pull in a blanket, and you go outside in the snow, in the rain, and have your cigarette and you had heaters, and little covered spaces. It was so much fun. I made out with so many people at that club, I can’t even tell you. […] They had some great DJ’s there […] it was so awesome.
M.W.: Straight guys would come to hear the DJs, ‘cause that’s how good the music was. Even if they were intimidated about being in the Village. That’s how good the club was.
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Premier local de l'ADGQ
Adresse : 1264, rue Saint-Timothée
(en usage de 1977-1981)
Suite à la manifestation contre les arrestations au Truxx et au Mystique, l’Association pour les droits des gai(e)s du Québec (ADGQ) continua sa lutte pour demander un ajout à la Charte des droits et des libertés de la personne du Québec qui protégerait les gais et des lesbiennes. La loi 88 est votée le 15 décembre 1977; le Québec devint le deuxième état au monde à interdire la discrimination basée sur l’orientation sexuelle. L’adresse ci-dessus est celle du premier local de l’ADGQ, que l’organisation a occupé entre 1977 et 1981.
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Parc de l'espoir
Adresse : 1294, rue Panet #1310
(inauguré en 1994)
Inauguré officiellement par la ville en 1994 avec une plaque commémorative pour les morts du sida, le Parc de l’espoir est un lieu de manifestation pour les organismes de VIH/sida et les groupes gais depuis 1990. Le parc continue d’être un lieu de rassemblement et de lutte : en 2016, suite à l’attentat au club PULSE aux États-Unis, des Montréalais.e.s se sont réuni.e.s au Parc de l’Espoir pour tenir un vigile pour les victimes.
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Sky
Adresse : 1474, rue Sainte-Catherine Est
(1995-ouvert)
M.W.: Back in the day, Sky was a cool club, did you know that? […] like, really really cool, it had three totally different bars. And I used to go to the underground one – the cave they used to call it. […] they used to play all really alternative music […] you know, like really alternative music, not on the radio, popular but not on the radio and it was awesome, and I think every single time I went down in that cave, I had at least three shots and ended up making out with some girl or a boy, like every time, every time. […] And then as things progressed in the 90s, Sky was doing all kinds of night. I remember at one point, and this is when I was really swinging out with the sisters as they say, they even had a Latina – now we would say Latinx – a Latino Thursday night.
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L'Aigle Noir
Adresse : 1315, rue Sainte-Catherine Est
(1992-ouvert)
M.W.: I started getting very comfortable in the leather scene, ‘cause I realized, I’m a leather man. That’s my thing. Maybe it connects to my Indigenous roots? I don’t know. First time I put on some leather, it was oh this is me, you know? I wasn’t wearing an outfit, this is part of my identity.
M.W.: So I started going out with one of my friends who is a big leather bear. And I’m talking like, he takes his shirt off, he wears a harness, and chains, and shorts, when he goes out, like, for real for real. And I started feeling so comfortable in that environment that I started going to Stock, the Stud, and the Black Eagle. It became the places I hung out. […] But then they changed owners, and changed back, and one of the owners is very … anti-woman. It didn’t matter if I was queer, it didn’t matter if I was leather, it didn’t matter if I was kinky, he did not want any pussy sitting at his bar. It was awful. […] [He didn’t let me do a photoshoot in there (?)], and I really wanted to do a photoshoot there, because, if they haven’t changed it – have you been to the Eagle? […] A fun thing about the Eagle is that they have a great mural, a Tom of Finland mural.
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A.P.: Now it makes me sad to go to the Village because there’s all these businesses are closing down, it’s not the same, it’s not the same feeling anymore because now there’s all these apps, there’s Grindr, there’s all of this. Before, we would go, to the bars because that’s where you would meet people […] And so Grindr, and all those apps completely changed all of that right. It kind of like, killed [laugh] you know, what the Village was and that sort of sense of community.
M.G. : je suis très attristée par le capitalisme rampant qui rentre dans tous les milieux LGBT, donc, tu vois, au début quand on faisait la fierté par exemple, et qu’on était dans la rue, il n’y avait pas de char, on était dans la rue nous-mêmes, en train de manifester. Aujourd’hui, toi en tant qu’individu, si tu vas à la Pride, moi j’y vais plus, j’ai arrêté ça. Mais, t’es sur le côté en train de regarder un défilé, c’est absurde. Et pis qui défile? Ce sont des corporations.
D.V.: But now, you know, people talk about it dying, what’s the use of a Village, everything’s online, there’s like Grindr for hookups, people don’t have to go to clubs anymore, I mean all this stuff is transforming the Village, but, you know, as much as people say that it’s dying, you know, just one cool bar opens up and everyone is there suddenly. So I don’t think it’s a matter of the Village it has to die, I think it’s a matter of the Village needs to keep evolving, and give people interesting spaces that have something interesting to offer.
Le Plateau
Si le Village est gai, le Plateau Mont-Royal est un quartier historiquement lesbien, même s’il l’est peut-être de façon plus informelle comparé au Village. Durant les années 1980, ou « l’âge d’or » de la visibilité urbaine lesbienne, plusieurs bars, cafés, et organisations communautaires parsemaient le Plateau. Bien que le nombre d’établissements mixtes à Montréal ait augmenté, le nombre de bars réservés aux lesbiennes est tombé de façon significative durant les années 1990, alors que les gais gardaient des bars réservés aux hommes.
Historiquement, les communautés gaie et lesbienne ont vécu des trajectoires différentes à Montréal. Les femmes étant légalement exclues des tavernes jusqu’en 1971, elles ne pouvaient pas avoir des établissements réservés comme les hommes. Dans les organisations mixtes de défense des droits des gais et des lesbiennes, les femmes ont souvent été mises de côté. Les lesbiennes, de classe moyenne surtout, ont décidé de mettre sur pied leurs propres lieux, et elles se sont installées massivement dans le Plateau. Les premiers organismes lesbiens, tels Montreal Gay Women (1973-1974) et Coop-Femmes (1977-1979), étaient situés dans les limites Sud-Ouest du Plateau.
M.G. : Ouais, à l’époque les bars de filles c’était vraiment aussi sur le Plateau. […] En fait, je pense que c’est entre Rachel et Sherbrooke qu’il y avait plusieurs bars. Je me souviens il y en a un qui s’appelait le Dietrich, il y en a un aussi s’appelait l’Exit, et ça s’était les bars où on allait prendre des bières et jouer au billiard. Donc j’ai appris à jouer au billard au Québec, tout le monde jouait au billard – en fait tout le monde – les lesbiennes [rire]. Et après il y avait d’autre bars où on allait pour danser. Donc le Sisters, dans le Village. Il y avait le Sisters, le Unity, on faisait souvent la tournée en fait.
M.W.: Earlier on in my queer explorations, I felt very excluded by the “gold star lesbians.” They didn’t believe in bisexuals. Which then people said it too, “I don’t believe in bisexuals, make up your mind,” I said I did make up my mind, I like both. I like pussy, I like dick. I like to give it, I like to get it. [laugh] And I’m a switch too, in the kinky world. I’m made this way, I’m so sure. But we didn’t have those terms back then.
M.W.: It’s funny, it was a lot easier for me later, after I came out as kinky, it was a lot easier to come out as kinky than to come out as bi, because … I just felt like that never suited my identity. I was pretty happy when Two-Spirit got rediscovered, or got put back on the table.
A.P.: It was nice in the Plateau because it’s super gay friendly as well so you always feel… I mean, pretty much I guess … a lot of different areas of Montreal feel safe and you feel sort of like, okay. But yeah, I’ve always loved the Plateau.
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Le Lézard
Adresse : 4177, rue Saint-Denis
(1987-1994)
M.W.: It was very alternative but you didn’t have to be alternative to go there. You know there were some really gothy bars where if you didn’t have tons of makeup and the right clothing, they’re not gonna let you in. With this place, the Lézard, I could go in there in my full, black, fishnets, you know the whole thing, lots of makeup, and I could bring a preppy, totally preppy, white ass boy from Sherbrooke, who studies business at HEC, and he would feel comfortable there. And there would be someone with a Mohawk and black tape on her tits, and she felt comfortable there. And you’d see long-haired [rockers?], and you’d see punks, and you’d see students, and you’d see that everybody mixed, and there was always a lot of action on the floor.
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Café Lincoln
Adresse : 4479, rue Saint Denis
(1936-1985)
« On m’avait prévenu : « Dès que t’es entré, prends l’escalier à gauche et va direct à la galerie au 2ème sinon tu vas te faire achaler... » De la rue, l’escalier était déjà sombre, le bruit s’amplifiait très vite en grimpant et j’ai cherché la poignée de la porte dans une noirceur quasi complète. Et là l’explosion : des tables entassées archi-combles de types de tous les âges qui enterrent la musique de leurs cris et hurlements, jouent du coude et se bourrent les côtes en pouffant de rire comme des gamins. Mais je suis aussi accueilli par une drôle d'Élégante tout en bouclettes grises et vieilles dentelles, bijoux clinquants, bouche écarlate qui me demande d’autorité mon âge et « As-tu dit à ta mère que tu venais ici ?!? », ajoutant immédiatement à haute voix en me pointant du doigt pour l’assistance : « Un Nouveau ! » - gros rires, sifflets et trépignements - j’ai à peu près l’allure d’un jeune séminariste échappé du noviciat et tout le monde a bien vu que je n’étais pas du coin; à 24 ans, je n’en parais pas encore 17. Et la vieille madame, c’est ‘La Goulou‘, un vieux rigolo du quartier qui joue les travestis le samedi soir - nom d’artiste évidemment inspiré de La Goulue du Moulin Rouge, Paris, immortalisée dans les affiches de Toulouse-Lautrec. Je prends l’escalier à gauche tel que prescrit, la scènette d’entrée a en fait duré à peine trente secondes. Dans la galerie de l’étage, autre clientèle, gens discrets, plutôt sérieux, qui sourient aimablement au nouveau venu un rien secoué, dont un intellectuel et critique célèbre à l’époque qui ne craint rien de plus que d’être vu là, au Lincoln. Il y aura suite. J’apprendrai aussi plus tard la visite d’un client très singulier, amateur de spectacles amateurs, car il y avait le dimanche de ces spectacles où, par exemple, un garçonnet de 7 ou 9 ans chantait La Vie en Rose accompagné à l’orgue Hammond par un autre vieux monsieur, cette fois à perruque Elvis qui lui glissait parfois sur l’oreille, la maman du petit chanteur essuyant ses larmes juste à côté. Et ce client particulier, ravi de son incognito au Lincoln, c’était Leonard Bernstein, l’auteur de West Side Story, encore frais. Je reverrai La Goulou vingt ans plus tard au hasard de l’Aigle Noir, doux vieillard discret et timide qui entreprend de me causer - je ne l’ai évidemment pas reconnu, mais dix minutes plus tard, c’est chose faite. Je lui raconte tout ça, ma première sortie au Lincoln, Leonard Bernstein : grande émotion - plus personne ne le connaît, quelques larmes. Je trouverai peu après chez un bouquiniste une jolie reproduction - format réduit - de La Goulue de Toulouse-Lautrec. Je l’achète, l’encadre sobrement, lui donne au 5 à 7 de l’Aigle. Je resterai ébranlé par l’énorme reconnaissance de La Goulou, ses amis même viennent me remercier - il a gardé le petit cadre bien en évidence à la tête de son lit jusqu’à sa mort, l’année suivante. Je crois qu’il s’appelait Émile... » -- Pierre M.W.
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La Sala Rossa
Adresse : 4848, boulevard Saint-Laurent
(construite en 1932)
La Sala Rossa a été construite en 1932 par la communauté juive de Montréal et a servi de centre d’activités culturelles, récréatives et politiques. C’est désormais le Centro Social Español qui utilise l’édifice comme centre culturel pour les gens hispanophones. La Sala Rossa est reconnue pour avoir accueilli des événements comme Le Kiss My Cabaret, le Meow Mix, la soirée The Goods, et des balls.
Les soirées Meow Mix (1997-2012) ont été créées par Miriam Ginestier et Irène, sa copine de l’époque. Ginestier a voulu créer une soirée pour les artistes de toutes sortes, les rebel.les, et les personnes aux goûts musicaux éclectiques. Jusqu’à leur fermeture, les soirées Meow Mix offraient un espace sexy et excitant profondément ancré dans les cultures queers et lesbiennes des environs.
:k-l. puis il y avait les soirées Meow Mix […] Donc ça c’était plus lesbien mais ce que j’aimais bien dans les soirées Meow Mix c’est que c’est des lesbiennes, et leurs copains ou copines. Enfin, c’était pas juste que des femmes. Ça j’aimais beaucoup parce qu’il y avait une crowd beaucoup plus artistique mais aussi des gens de Longueuil, et c’était leur sortie, ou de Laval. Donc il y avait un mélange d’âges, il y avait un mélange de styles… C’était très convivial et moi j’aimais beaucoup ces soirées-là. […] Donc Sala Rossa c’était le lieu où ça se passait. Ça c’était plus 2006… quand moi j’suis arrivé.e à plus ou moins deux mille […] 2010 je dirais, 2012.
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Parc Lafontaine
(inauguration en 1901)
Le parc La Fontaine, lieu de détente populaire, était aussi un espace de drague pour les hommes gais du moins jusqu’au tournant des années 2000, comme le parc du Mont-Royal. Le parc La Fontaine est aussi un lieu de lutte : en 1979, une manifestation mixte d’environ 200 personnes pour les droits des gais s’y est déroulée. La même année, la première marche de la fierté gaie à Montréal, organisée par John Banks, a vu au moins 200 personnes défiler du Square Saint-Louis jusqu’au parc dans le cadre de la semaine de la Gairilla.
A.P.: Parc Lafontaine was another place that we would, you know, go and hang out, and visit … And sometimes we would go there and see the people cruising at night or whatever.
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le Jailhouse
Adresse : 30, avenue du Mont-Royal Ouest
(1992-2001)
Le Jailhouse faisait partie des nombreux endroits où les soirées Meow Mix (1997-2012) se déroulaient.
M.G. : J’ai toujours adoré aller danser, et plus ça allait, moins il y avait d’espaces pour les filles et alors il y a un truc qui était hyper important pour moi à l’époque c’est les soirées Meow Mix. C’était des soirées organisées par Miriam Ginestier qui est directrice du studio 303, et qui organisait dans les années 90, jusqu’à maintenant en fait, des soirées une fois par mois pour les lesbiennes et leur buddies. Ça veut dire que moi je pouvais amener mes copains pédés. C’est des soirées où il y avait des cabarets puis après on dansait. Et ça c’était génial parce que c’était le seul endroit où les anglophones et les francophones étaient ensemble et dansaient ensemble. Et à l’époque c’était très compliqué parce que les années 90s, enfin 1995 c’était quand même le vote pour l’indépendance […] Tu ressentais vraiment les deux mondes complètement … qui ne se parlaient pas je trouvais. C’était des soirées organisées par des anglos, il y avait beaucoup de francophones et il y avait un vrai mélange. C’était super et ça a duré des années. Et ça se passait au Jailhouse, c’était un bar sur Mont-Royal, et par la suite dans les années 2000, ça a bougé à la Sala Rossa
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Le Belmont
Adresse : 4483, boulevard Saint-Laurent
(Mec Plus Ultra : 2008-2012)
Il est souvent arrivé que les endroits queers deviennent des lieux hétérosexuels. Parfois, c’est le contraire qui arrive: Ainsi, le Belmont devenait gai au moins une fois par mois. En 2008, les soirées bimensuelles Mec Plus Ultra (MPU) voient le jour (ou la nuit) jusqu’en 2012 à l’initiative de Julien de Repentigny, François Guimond et Antoine Bédard.
M.W.: Someone came up with a queer night at the Belmont. So this became a thing now. They would go to a straight area of town after Parking closed and whatever. Or around the time it was transitioning. And they’d just talk to the owners and go, okay, we know that your Saturday night is heterosexual douchebags. But can we have Thursday? Or can we have one Saturday a month? […] Cause a lot of gay guys started living in the Plateau, they weren’t living in the Village. The play on words for nec plus ultra became Mecs Plus Ultra. They would just become some really really really fun nights. First you would go to the Meow Mix, and they you would leave the Meow Mix early to go finish the night, with the gay boys at the Belmont so that was really fun.
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Le Cirque
Adresse : 4465, boulevard Saint-Laurent
(dates inconnues)
Le Cirque faisait partie des nombreux endroits où les soirées Meow Mix (1997-2012) se déroulaient.
M.W.: They were crazy the old Meow Mixes, I mean crazy! I mean shirts off, and everyone making out in a hot sweaty mess with their tits out. It was amazing. People would go crazy, so much fun.
M.W.: You know in the beginning when people were trans or non-binary, and trying to pass, it was really hard for them in the beginning. That was one of the few places that would let them in. It’s not like now, someone is a butch for a minute, and they transition, okay, people were butch for ten years before they even considered taking hormones or doing any kind of transitioning. It was a very strict dichotomy of femme and butch, which again I had a problem with.
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École Gilford
Adresse : 2025, rue Gilford
(1984-1993)
L’école Gilford était le lieu principal d’activité artistique et politique de la communauté lesbienne francophone à Montréal. Le centre communautaire et artistique était géré en mode coopératif par Arts et Gestes des femmes de Montréal, un collectif qui réunissait des représentantes de chacun des groupes composant l’école Gilford.
« Gilford était constamment achalandé. Des artistes s’y rendaient quotidiennement pout s’exercer, travailler sur leurs productions ou donner des ateliers. Alors que les enseignantes et étudiantes de l’École des Arts martiaux des femmes de Montréal pratiquaient le karaté et le tai-chi dans le gymnase les soirs de semaine, des ébénistes oeuvraient à temps plein au sous-sol. Simultanément, deux peintres habitaient leur atelier tandis que des musiciennes partageaient une salle de répétition avec la Chorale lesbienne. Un plus petit local abritait les Archives lesbiennes Traces pendant qu’une imprimeure mettait sa presse au service de publications lesbiennes. D’autres groupes, par contre, ont utilisé la bâtisse de façon plus ponctuelle; par exemple, Alcooliques Anonymes y a tenu pour un temps des réunions dominicales pour femmes. Lorsqu’un événement était en préparation – ce qui était souvent le cas –, l’édifice entier bourdonnait. Ajoutons que l’école était gérée selon un mode coopératif par ce qui s’appelait officiellement Arts et Gestes des Femmes de Montréal, une collective qui réunissait des représentantes de chacun des groupes, lesquelles prenaient ensemble les décisions concernant le fonctionnement et l’orientation de Gilford. » -- Suzanne Boisvert et Danielle Boutet dans Sortir de l’ombre, page 315.
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k-l. : C’était safe. Au moins je savais que j’allais pas me faire ennuyer par un dude ou une pitoune qui me disait de pas rentrer dans les toilettes ou qui m’interdisait, etc., mais il y avait un autre pendant, c’était le racisme aussi. […] Ou bien il y avait le fétichisme des Afro-descendant.e.s souvent, c’était « oh la Black! Je t’aime parce que t’es Black » ou « Je t’aime parce que t’es Asiatique, » ça aussi c’était un peu chiant, parce que ça fait partie de la game, après c’est à toi de te défendre et ne pas accepter ou remettre la personne en place. C’est pas parce que t’es gai, Occidentalement passing white que tu ne fais pas des faux pas ou tu fais pas des énormités – pas des insultes raciales mais comme, un peu condescendantes. Enfin, le colonialisme existe partout et ça c’était quelque chose que je devais gérer en plus.
Le Red Light District et la Main
Le Red Light est un quadrilatère approximativement défini par le boulevard Saint-Laurent à l’ouest, la rue Sherbrooke au nord, le boulevard René-Lévesque (auparavant Dorchester) au sud, et la rue Saint-Denis à l’est. La Main désigne l’extrémité ouest de ce quadrilatère, donc le boulevard Saint-Laurent.
Dans les années après la Deuxième Guerre mondiale, ce quartier avait déjà une mauvaise réputation à cause de son association au crime, au travail du sexe, et à la présence de personnes visiblement non-hétérosexuelles. Pour les lesbiennes des années 1950-60, les bars du Red Light étaient leurs principaux lieux de rencontres. Même si des gais, des lesbiennes et des travestis socialisaient dans les bars et les cabarets de ce quadrilatère, plusieurs de ces lieux avaient une clientèle mixte, c’est-à-dire que des hétérosexuels les fréquentaient également. De plus, même parmi les gais et les lesbiennes, les anglophones et/ou les membres de la classe moyenne avaient tendance à éviter le Red Light, à cause des associations négatives énumérées ci-dessus. Malgré tout, pour ceux qui fréquentaient ces établissements, ces lieux étaient chers et importants, car ils permettaient une liberté que le reste de la société n’accordait pas aux marginaux.
P.M.W. : Il y avait évidemment l’époque des bars, ce qu’on appelait les trous, les trous de la Main, de la rue Saint-Laurent. Mais là, on allait pas parce que c’était carrément le quartier euh … le quartier des putes et des vraies tapettes, c’est-à-dire les vieux pédés, les vielles tapettes des années 50, hein, très très caricaturales, auxquelles on voulait surtout pas être associés. C’était, on était assez, comment dire, résistants de ce côté-là hein. Ben évidemment. L’image à l’époque de l’homosexualité c’était évidemment tout ce qui était visible c’est-à-dire –ridiculisé, féminité, travestis, etc.
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Café Monarch
Adresse : 162, rue Sainte-Catherine Est
(fin des années 20-années 90)
Établi à la fin des années 1920, le café Monarch est un des premiers lieux gais établis dans la partie est de la ville, ainsi qu’un des seuls établissements permanents des années 1945-1960 qui était exclusivement réservé aux homosexuels. Le Café Monarch était aussi surnommé le «Zoo», un terme donné à d’autres endroits considérés comme au bas de l’échelle à l’époque.
«We used to go very often from there [Montreal Swimming Club] at the Monarch or the Zoo. We were always treated like royalty. They had contests that the guy used to play the piano and if you could guess the name of the song you got a free beer and that sort of stuff.» Armand Monroe dans A Sense of Belonging (Higgins 1997, 278)
«The customers were of an oIder age group. The Monarch had a dance floor where a sign I observed in the mid-1970s forbade slow dances. Pierre explained: Oui, oui, oui, ils voulaient pas avoir de troubles avec la police. C'était une mesure de protection pour l'escouade de la moralité. Comme aujourd'hui, avec les affiches sur les drogues. » (Higgins 1997, 283)
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Les Ponts de Paris
Adresse : 1278, rue Saint-André
(1956- 1988)
Les Ponts de Paris était un cabaret dont la clientèle mixte était divisée en trois sections : les lesbiennes à gauche de la scène (dans une section réservée aux femmes); les personnes hétérosexuelles et les hommes gais à droite ; et celleux qui voulaient se payer des services sexuels au bar. À l’entrée, le portier se basait sur sa perception de l’orientation sexuelle de la clientèle pour diriger les gens vers une section ou une autre.
Dans les années 1950, Les Ponts de Paris est devenu très connu comme lieu de rencontre pour les lesbiennes. Cela permettait à plus de lesbiennes de connaître l’endroit, parfois par le biais de membres de leur famille ne se doutant pas de leur orientation sexuelle. Cependant, la popularité accrue les a aussi exposées aux regards voyeurs des autres clientèles. Dans le but d’assurer la sécurité de sa clientèle lesbienne fidèle, Les Ponts de Paris utilisait différentes stratégies mises en place et appliquées par les propriétaires, les gérants, les serveuses et les autres clientes du cabaret.
Des narratrices du projet de recherche de Line Chamberland (Remembering Lesbian Bars, 1993) décrivent le cabaret comme un lieu chaleureux où elles pouvaient avoir du plaisir, où elles ont formé des amitiés, et ont pu assister à des mariages lesbiens. Pour elles, le cabaret était comme une grande famille.
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La Paryse
Adresse : 302, rue Ontario
(1980-2012)
La Paryse était l’un des restos et cafés que fréquentaient les lesbiennes. Comme plusieurs autres lieux dont la clientèle n’est pas explicitement LGBTQ2S+, c’est le fait que les employés sont LGBTQ2S+ qui attire d’autres personnes non-hétérosexuelles et qui contribue au sentiment de sécurité. Ce resto aux « meilleurs hamburgers de Montréal » a fermé ses portes en 2012.
M.G. : Et puis on allait manger aussi à la Paryse à l’époque parce que il y a plusieurs ami.e.s qui travaillaient là, donc on était sûr de trouver des gens qu’on connaissait, la bouffe était bonne puis elle était abordable, pour les gens comme moi qui avaient pas trop d’argent.
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Café Cléopâtre
Adresse : 1230, boulevard Saint-Laurent
(1976-ouvert)
Ouvert dans les années 1970, le café Cléopâtre est le dernier des vieux établissements du Red Light qui reste encore ouvert. Alors qu’au premier étage, il y a des spectacles de strip-tease avec des travailleuses cisgenres, attirant surtout une clientèle mâle hétérosexuelle, le deuxième étage offre des spectacles donnés par des drag queens et des personnes trans, qui étaient marginalisées même dans la communauté gaie.
P.M.W.: [Parlant des années 70] le Cléopâtre était déjà là, et c’était le vrai Cléopâtre avec, les danseuses, les travestis, les gais, les p’tits dealers et tout le truc.
M.W.: Now, if you were charging money at the door, and you wanted to have alcohol, you couldn’t have alcohol in the same room as people were getting naked, did you know that? Isn’t that crazy? Yeah, you know the only place in Montreal that has a licence to perform on stage, sell alcohol and do a full Monty, a full frontal, and it’s the fucking café Cléopâtre.
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Cabaret Casa Loma
Adresse : 94, rue Sainte-Catherine Est
(1954-1974)
Ouvert en 1954, Le Casa Loma faisait partie des nombreux cabarets de Montréal durant les années 1950 et 1960. Bien que la clientèle n'y soit pas strictement homosexuelle, de nombreux gais et lesbiennes de l'époque le fréquentaient. Ce cabaret de Montréal comme beaucoup d'autres présentait des spectacles d'artistes travestis qui étaient bien populaires à l'époque. D'autres artistes bien connus y ont donné des spectacles (Ginette Reno, Alys Robi, les Jérolas, etc.). La fermeture du Casa Loma en 1971 serait due à des causes multiples: l’arrivée de la télévision, l'ouverture de la Place des Arts ainsi qu’un triple assassinat lié au crime organisé.
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Bar Exotica
Adresse : 417, rue Saint-Pierre
(dates inconnues)
Situé un peu à part des principaux pôles gais de Montréal, le bar Exotica était un bar latino qui se trouvait au vieux Montréal.
A.P.: At the time, there was a gay Latino bar and it was called Exotica. And that one wasn’t in the Village, it was in the Old Montreal […]
A.P.: It was funny, I mean it was – because, first it was outside of the Village, it was in the Old Montreal, so you know, you would get that feeling of going into the old buildings right, and everything and then you would go, and it was kinda in the basement of the place, you would have to go down a little bit , and it had, these, crazy red velvet curtains, you know like – Yes [laughter] yes oh my God [still laughing] like a sex … um parlor or something, or a brothel kind of thing, and it had like these chandeliers, and the red velvet curtains, and the Latino music playing, and it was also kinda funny and kinda sketchy now that I think back, but it was all these old, white, men, who were like all standing from the bar, behind the bar like looking at all of the young Latinos dancing.
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Groupes universitaires et collégiaux
Les organisations LGBTQ2S+ des universités et des cégeps ont joué et continuent de jouer un rôle important dans la vie des personnes LGBTQ2S+. Par exemple, des groupes comme Gay McGill, formé en 1972, répondaient à des besoins tels que l’éducation sur des thèmes gais, des services d’aide psychologique, et tout simplement l’organisation d’évènements sociaux. Notamment, les danses gaies de McGill pouvaient accueillir des centaines de personnes. Les cégeps du Vieux-Montréal et de Maisonneuve organisaient aussi des évènements similaires. Les groupes LGBTQ2S+ étudiants continuent encore à répondre à ce besoin de communauté, et constituent un lieu où l’on peut accéder à de l’information sur l’identité sexuelle et de genre.
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Etcetera
Adresse : College Dawson, 3040, rue Sherbrooke Ouest
(1985- à aujourd'hui)
D.V.: I felt completely safe at Dawson. Dawson’s like, a very urban CEGEP, it’s the largest CEGEP in Quebec, it is… like … it feels like you’re in New York City. It feels like everyone’s busy, too busy to be involved in you, you can be anonymous, there’s so many people, the halls are crowded, everyone is different, it was – you’re like, anonymous in a crowd.[…] In particular there was a kind of club space, a space designated for clubs on campus, and there were actually several rooms, but there was one in particular, 2C.12. It was on the second floor, it was in C corridor, and it was room number 12. And it was like a real refuge for a lot of queer kids, because that was the club space for Etcetera, which was the queer, LGBTQ+ club on campus. So, it was also shared with the feminist group on campus, which was called Young Amazons, and GAIA, which was the environmentalist group. And, it was like, a very liberally-minded, very progressively-minded, almost militantly-so … this space where it was like radical inclusion. While we were anonymous, and sort of just like, no one heard about us in the hallways, that was a place where we actually felt accepted.
D.V.: 2C.12 only exists in photos, ‘cause I think, I went back like, years later and they reconfigured that whole floor. And they, like, Etcetera and that space is not a club space anymore, and it’s like, completely different. So 2C.12 only exists in our memories now
D.V.: In the end it only matters the chemistry of the people. The space was like, just, like a canvas, for what we felt. And that is really more what I remember, it’s like, the way we felt like a community then. We like, loved each other so much.
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Montréal, en déclin?
On se rend compte que l’embourgeoisement du Village est de plus en plus marqué comme dans plusieurs autres endroits à Montréal. Plusieurs commerçants du Village remarquent que leurs entreprises font moins de profits. Peut-être est-ce un signe que les lieux LGBTQ2S+ ne soient plus aussi nécessaires pour les rencontres ou pour se sentir en sécurité ? Peut-être est-ce un signe, au contraire, d’une certaine marginalisation à cause des politiques municipales qui permettent cet embourgeoisement ? Tout de même, le manque de lieux explicitement LGBTQ2S+, et la fermeture de plusieurs lieux de socialisation se font sentir.
M.G. : les femmes ont de moins en moins d’argent. Clairement. Donc, elles sortent moins, elles dépensent moins. Les bars, pour les femmes, peuvent pas exister longtemps, ça c’est très clair. […] Il y a plus rien à Montréal, il y a plus rien. Il y a que des endroits pour les gais, et… pour qui? Et encore, tu vois, j’ai des amis gais qui veulent plus sortir parce que les lieux sont … un peu glauques. […] C’est toujours éphémère. En fait, les endroits où je vais il se passe des choses c’est les festivals. Musique, films, ou autre chose, et je suis sûre de retrouver une communauté de gens.
M.B.P. : [parlant de centres communautaires LGBTQ2S+] je sais qu’il y avait Arc-en-ciel d’Afrique, mais ça l’a fermé il y a quelques années, ça l’a fermé quand je commençais à m’ouvrir. Donc, honnêtement non, à Montréal je connais pas mais, j’sais pas, ça a pas l’air … Il y a rien spécifiquement pour les personnes noires, donc – peut-être plus maintenant, donc, non.
Nouvelles directions
Malgré le déclin du Village et des bars lesbiens, il existe quand même plusieurs endroits queer/trans-friendly aux alentours de la rue Jean-Talon, dans les quartiers de Rosemont et de la Petite-Italie, et dans d’autres quartiers. Les personnes LGBTQ2S+ peuvent se sentir à l’aise dans des lieux qui ne sont pas explicitement queers ou trans. Après tout, nos identités sont complexes. D’ailleurs, nous sommes des communautés, et non pas une seule communauté. Les identités multiples, de genre, d’orientation, de race, d’origine ethnique, de langue, etc., font que les caractéristiques de chaque personne LGBTQ2S+ sont uniques. Plusieurs narrateur.rice.s ont indiqué vouloir que les communautés LGBTQ2S+ soient plus politisées et collaborent plus étroitement avec d’autres groupes pour lutter pour la justice sociale, tels que l’équité raciale ou le féminisme, entre autres.
M.G.: Pis là en ce moment là où j’habite c’est très très très très queer [rire] […] J’habite à côté du Pickup, j’sais pas si tu connais, c’est un endroit qui a été ouvert par la chanteuse – pas la chanteuse mais Bernie des Lesbians on Ecstasy notamment, c’était un groupe de lesbiennes dans les années 2000, et c’est quelqu’un qui a ouvert plusieurs endroits, ils ont ouvert un restaurant, ils ont ouvert un bar, et ils ont employé beaucoup de personnes de la communauté, donc ces lieux-là font que ça amène d’autres gens, donc les gens viennent habiter dans les quartiers puis c’est très très très très queer.
k-l. : Je suis né.e intersexe. Donc ça c’est aussi le I dans le LGBTIQ, […] c’est vraiment la dernière lettre. Même dans le défilé gai à Montréal, c’était il y a deux ans seulement, que ça a eu le premier – on a eu notre première petite banner là, on était 3-4. [rire] Mais bon, on était là quoi. Donc ça c’est aussi important c’est que moi je me sens ni fille ni garçon ou pas assez fille pas assez garçon; trop garçon ou trop fille. Ça ça dépend comment on le voit mais … c’est pour ça que je me sens plus agenré.e.
M.B.P. : T’as le sentiment d’objectification et tout qui traverse ma pensée. Je me sens pas jugé.e […] Pis c’est aussi que, il y a pas personne, pas personne qui me ressemble tant, donc c’est aussi ça qui manque dans qui je vais croiser par exemple. Pis surtout peut-être parce que, là je parle vraiment dans la communauté queer, par exemple dans le Village, des trucs comme ça, le Plateau, Rosemont, mais comme, il y a d’autres queers dans les quartiers racialisés mais … c’est un peu plus difficile [rire]. […] Les milieux politiques, sociaux, culturels, des fois, que je me sentais super bien, pis que comme, c’est venu un peu combler ce besoin-là. Aussi juste d’être dans une place, que tu te sentais accepté.e, les jugements étaient le moindre de tes soucis, pis ça, ça l’a vraiment passé par – j’ai fait partie, ben, co-créé.e avec d’autres gens, le collectif anti-raciste/décolonial à Québec Solidaire, avec des gens que je connaissais déjà pour la plupart. Là je viens de quitter parce que je veux me concentrer sur mes études et autres initiatives, mais, c’est vraiment des gens pis un espace qui m’a fait fleurir.
k-l. : Moi je vais dire que je me sens plus en sécurité en tant que lesbienne, ou lesbian-passing ou queer en tout cas qu’Asiatique, surtout au moment de la pandémie. Ça m’a un peu dégouté.e en fait, le fait d’être à Montréal pendant la pandémie. Ça m’a vraiment fait [son de nausée]. À un moment je me disais, est-ce que je me casse? Parce que j’en ai marre de pas pouvoir – de marcher comme un rat, d’avoir peur que quelqu’un me tape dessus quoi, ou m’insulte, ou me dise de retourner dans mon pays – ce qui est vrai, j’suis pas d’ici, mais eux aussi ne sont pas d’ici parce ce sont des enfants de settler […] je comprends qu’il y a aussi le stress de la pandémie mais c’est pas pour ça que tu dois cracher ton venin sur quelqu’un d’autre.
M.G. : Beaucoup de groupes – ben surtout des gais blancs, hein – oublient en fait les problèmes sociaux, et d’argent, et de … bah toutes ces questions! Que les mouvements LGBT mettaient en avant et que tout d’un coup ça disparaissait, donc, là je retrouve plus ce – Ben avec tout ce qui s’est passé, Me Too, Black Lives Matter, il y a beaucoup beaucoup – les gens comprennent que l’intersectionnalité c’est ultra important et qu’il faut pas l’abandonner … Donc c’est vers ces milieux là que je me tourne quoi.
M.W.: I discovered that Montreal has a very fun, naughty side, but it definitely suffers from what I like to call the Catholic hangover […] people would be like sitting on a terrace, and then be talking trash, talking sex, talking whatever, but then they’d be like “oh! [mocking judgement]” and you could just hear people either shaming someone, or blaming someone, that is Catholic and Protestant, and very North American and very, like either French or English, it’s so prevalent.
Conclusion
Les quartiers définis dans l’exposition sont loin d’être les seuls endroits où les personnes LGBTQ2S+ convergent. Il y a autant de lieux LGBTQ2S+ qu’il y a de personnes qui s’identifient comme tel. Nous rendons et créons nos propres espaces tout simplement en existant.
Cette carte ne peut pas capturer toutes les expériences ni tous les enjeux qui nous concernent. Tout de même, les entrevues de seulement sept narrateur.rice.s démontrent déjà la diversité de nos communautés. C’est en racontant nos histoires que l’on peut espérer comprendre d’où l’on vient et c’est en nous écoutant que l’on peut s’entendre sur nos directions futures.
A.P.: And I think that’s what Montreal is, like I mean it’s … of course there’s a lot of racism, there’s a lot of [pause] shit and you know whatever but! I decided, that this was going to be my safe place, even if it’s all in my head, but I decided that this was where I belong, and this is where I felt I belong.
D.V.: if it was your space, it would be a queer space
Si vous voulez parler de vos propres expériences, n’hésitez pas à laisser un commentaire.
Pour faire un don d’archives aux Archives gaies du Québec, veuillez contacter : info@agq.qc.ca
Les entrevues intégrales de certain.e.s narrateur.rice.s sont disponibles en consultation sur place aux AGQ. Inscrivez-vous à notre infolettre en nous envoyant um message info@agq.qc.ca pour connaître la date de la réouverture du local et recevoir nos nouvelles :
Remerciements
Remerciements originaux de la part de V. Samoylenko: Cette exposition a été rendue possible grâce à la collaboration des narrateur.rice.s qui ont généreusement partagé leurs histoires et apporté leurs commentaires tout au long du processus de recherche.
Un énorme merci à Pierre, Armando, Derek, Ménélik, Mathilde, kimura-lemoine et Michelle, non seulement pour leur participation aux entrevues, mais aussi pour leurs conseils, leur aide dans le recrutement, et pour plusieurs photos des lieux, qui rendent l’exposition plus vivante.
Merci aux bénévoles et aux employés des Archives gaies du Québec qui m’ont donné des pistes de recherche pour les photos, et aux membres de la communauté qui ont offert leurs commentaires. Un grand merci à Fabien Galipeau, archiviste des Archives gaies du Québec, pour m’avoir aidé à retrouver des photos, des adresses, et aussi pour l’écriture des textes sur l’Androgyne, le PJ’s, et le Casa Loma.
Merci à Mitacs et Emploi d’été Canada pour le financement du projet.
Nous avons malheureusement appris que Michelle Wouters est décédée le 28 octobre 2022. Michelle était une survivante bispirituelle de la Rafle des années 60 et une éducatrice dans la communauté montréalaise. Nous voulons encore une fois la remercier pour ses témoignages remplis d'énergie contagieuse qu'elle a gracieusement offerts pour Les murs ont des oreilles. Son entrevue reste conservée aux Archives gaies du Québec dans son intégralité et le restera toujours. Repose en paix.
Remerciements additionnels pour la version piétonne:
Un grand merci à l’équipe des AGQ de l'été 2021: Fabien Galipeau, Marion Daigle, Jonathan Proulx Guimond, et Simone Beaudry Pilotte. Merci beaucoup à V. Samoylenko pour son aide à travers le processus d'adaptation.
L’exposition piétonne a été rendue possible financièrement grâce à Desjardins, Fierté montréal, Village Montréal, Emploi-Québec, Emploi d’été Canada, Québécor, les donateurs/donatrices des Archives gaies du Québec.
Merci de la collaboration des: Archives Lesbiennes du Québec, Michelle Ronback, André Querry, André C. Passiour, Ross Higgins, Fugues, l’équipe de Village Montréal, et l’équipe de Fierté Montréal.
Sources consultées
Allan, James «Sky’s the Limit: The Operations, Renovations and Implications of a Montréal Gay Bar.» Mémoire de maîtrise. Université McGill. 1997.
Boulevard Saint-Laurent. «La Sala Rossa: À propos.» Consulté le 24 juin 2021.
Chamberland, Line MA. «Remembering Lesbian Bars: Montreal, 1955-1975.»Journal of Homosexuality, Volume 25, Numéro 3. 1993. pp. 231-270.
Crawford, Jason B., and Karen Herland. “Sex Garage: Unspooling Narratives, Rethinking Collectivities.” Journal of Canadian Studies/Revue d'études canadiennes, Volume 48, Number 1. Winter 2014. pp. 106-131
Demczuk, Irène, and Frank W. Remiggi, éds.. Sortir de l’ombre: histoires des communautés lesbienne et gaie de Montréal. Montréal: VLB Éditeur. 1998
De Montigny, Julia. « Negotiating Everyday Spaces, Making Places: Queer & Trans* Youth in Montréal.” Mémoire de maîtrise. Université Concordia. 2013.
-----. «Le Drugstore: Chronique d’une fermeture annoncée.» Fugues . 18 octobre 2013. Consulté le 24 juin 2021.
Lecavalier, Philippe. «Le Village gai de Montréal: Un territoire d’appartenance en voie de disparition?» Mémoire de maîtrise. Université du Québec à Montréal. 2018.
Podmore, Julie A.. “Gone ‘underground’? Lesbian visibility and the consolidation of queer space in Montréal.” Social & Cultural Geography, 7:4 (2006), 595-625. DOI: 10.1080/14649360600825737
-----. “Lesbians in the Crowd: Gender, sexuality and visibility along Montréal's Boul. St-Laurent.” Gender, Place and Culture: A Journal of Feminist Geography, 8:4 (2001): 333-355. DOI: 10.1080/09663690120111591